Le design thinking c’est pas nouveau et ça marche !
En 1950 aux US, on parle déjà de brainstorming (Alex Osborn pour BBDO). En 1960 à la prestigieuse université de Stanford, on enseigne le Product Design ; ce programme est human-centered. En 1987, Peter Rowe publie son ouvrage Design Thinking aux presses du MIT. Et en 1991, David Kelley, Bill Moggridge et Mike Nuttall créent IDEO a global design company.
Les success stories d’Eye-dee-oh sont nombreuses (*1. Réf IDEO) : première souris industrielle pour le Lisa d’Apple, premier Notebook pour GRiD Systems. IDEO œuvre encore aujourd’hui pour proposer des solutions sur la mobilité urbaine ou encore des programmes d’éducation au Pérou. Les processus de design thinking sont donc applicables partout et on constate que les solutions développées sont pérennes. Plus de trente ans après la publication de Design Thinking, la discipline est encore largement promulguée aussi bien à Paris Ponts et Chaussées qu’à Hong-Kong Polytechnic University, Londres Royal College of Art, en passant par Copenhague Copenhagen Institute of Interaction Design. Bien-sûr le classement (*2. Réf. Insider 2012) des meilleures écoles de Design intégrant un programme de design thinking est là aussi dominé par les étasuniens (MIT, Stanford, Carnegie Mellon, Berkeley, UCLA) mais ça aussi ce n’est pas nouveau.
Les briques malléables du processus
Alors concrètement comment se déroule la méthodologie de design thinking ? Gardons en tête les principes clef : l’approche est orientée solution, centré sur l’humain et inclut les retours utilisateurs. Les besoins utilisateurs étant rarement explicites, il vous faudra beaucoup reformuler la problématique, brainstormer, prototyper, tester. Et ce avec une équipe pluridisciplinaire (designer, ingénieur, développeur, marketeur par exemple) dans un esprit de bienveillance et de co-construction.
Nous pouvons identifier cinq étapes majeures de la méthodologie de design thinking parmi les modèles les plus influents et les plus fructueux. Pour information, des modèles formels en trois ou sept étapes ont été publié notamment par Tim Brown (PDG d’IDEO) Inspiration, imagination, implémentation et Herbert Simon The Sciences of the Artificial, 1969 (prix Turing en 1975 puis prix Nobel d’économie en 1979).
Nous nous intéresserons ici principalement au modèle proposé par la d.school (Design school de Stanford). Le modèle se décline en cinq processus :
1 – Etre en empathie
Un exercice bien difficile que de se mettre à la place de l’autre. Cela requiert de l’intelligence émotionnelle. Acquérir de l’empathie envers vos utilisateurs vous permettra de mieux comprendre leurs expériences et leurs motivations. Vous devez faire abstraction de vos logiques de pensée et gagner une réelle compréhension des problématiques ressenties. Ainsi vous pourrez gommer des frustrations ou des déceptions de l’utilisateur et créer une expérience innovante.
Plusieurs techniques sont envisageables selon votre budget et planning. Avant tout consulter des experts du domaine à étudier. Observez les utilisateurs et immergez-vous dans leur environnement. Les ergonomes vous parleront de shadowing ou être l’ombre de l’utilisateur pour mieux capter le niveau de stress ou les difficultés physiques liées au problème à solutionner.
2 – Définir la problématique
La question du WHY? est essentielle. Pourquoi voulons-nous créer ce produit ? Pourquoi faire ?
Sans préjuger de la solution, bien poser la problématique est déjà une part de résolution. L’utilisateur ne sait pas exprimer explicitement son besoin ou n’est peut-être pas pleinement conscient de son besoin. Le designer doit donc amener les utilisateurs et l’équipe à reformuler la problématique. Toujours dans l’esprit de bienveillance et human-centered.
En co-construction, établissez les critères de réussite. Inspirez-vous des expériences passées et de vos nouvelles observations. Personnifiez les objectifs à atteindre.
3 – Générer des idées
L’analyse et la synthèse de vos observations doit permettre à l’équipe de générer des idées en vrac. Plusieurs techniques d’idéation sont possibles : brainstorming / remue-méninges d’Alex Osborn, SCAMPER d’Alex Osborn et d’Eberle ou encore le Mind mapping et mind map de Tony Buzan.
Durant cette phase, veillez à récolter un maximum d’idées sans jugement et dans un temps limité. Multipliez les possibilités et favorisez les idées originales, celles qui semblent les plus folles. Optez pour la technique d’idéation qui stimulera le plus la créativité de l’équipe.
4 – Prototyper
Affinez votre idée et créez un prototype peu coûteux. Cela peut être une simple maquette statique animée artificiellement ou un objet monochrome imprimé en 3D.
De nombreuses applications offrent la possibilité d’obtenir des prototypes d’objets ou de sites web ou encore d’applications mobile avec des icônes et pictogrammes standardisés (Mockup, Sketch, Balsamique, Marvel, Ionic).
5 – Tester
Testez votre prototype au sein même de l’équipe puis dans un autre département et dans un autre groupe restreint indépendant de l’équipe de conception et de l’entreprise. Les tests interne et externe permettent de multiplier les angles de vues. Ne vous contentez pas de biais de confirmation et accueillez les retours utilisateurs en les observant en situation. Analysez leur comportement, ce que l’utilisateur ressent, pas seulement ce qu’il vous dit, soyez toujours en empathie.
La phase de test révèle d’autres problèmes et vous amène à reformuler la problématique et/ou à affiner le prototype.
Itérer rapidement avec un brin de folie sans borne
La méthode est décrite par étape successive où un lot d’activités conduit logiquement à la suivante. Cependant la démarche n’est pas linéaire. Bien au contraire, cette méthodologie est flexible et modulable. La phase de test soulèvera de nouvelles problématiques, qui nécessitera de nouvelles analyses et générera un prototype amélioré à tester. Itérer donc rapidement sans appliquer de recette toute faite. Inspirez-vous tout au long du projet des expériences et retours utilisateurs : human-centered.
Une démarche centrée sur l’humain suppose une ouverture d’esprit et une valorisation de l’expérimentation sans peur de l’échec au sein de l’entreprise. Les entreprises avec une forte culture de l’expérimentation et du prototypage intègrent de manière naturelle les processus de design thinking. On renouvelle sans cesse les façons d’aborder les problématiques et l’on favorise les réponses originales. Peut-être un peu folles, ces réponses originales doivent déstabiliser et créer un joyeux chaos. Les entreprises qui jouent le jeu sont alors capables de créer des produits ou de lancer des plateformes radicalement innovantes.
D’autres entreprises plus frileuses sur ce type d’approche car plus habituées à des méthodologies et processus linéaires, créent des Labs, des Ruches, des Plateaux d’innovation où l’on pratique facilement le design thinking. Ces bulles de créativité proposent des espaces dédiés sensés accueillir et accélérer les projets d’innovation. Ces tentatives sont louables et confirment souvent une volonté de faire autrement (supposée mieux).
Ces structures multiplieront leur chance d’être innovantes sous conditions d’abattre les murs de leurs bulles et d’inclure l’entreprise dans sa globalité.
Alors voulez-vous tenter l’aventure ?
Vous l’aurez compris, le design thinking est donc une méthodologie applicable par toute entreprise en recherche d’innovation. Le design thinking est un outil puissant générateur de créativité. C’est bien là l’objectif essentiel de la démarche pratiquée à travers le monde.
En tant que consultante en transformation digitale, je travaille en permanence avec des sociétés où des vagues de design thinking ont été insufflé. Celles qui réussissent réellement sont parvenus à rassembler des experts bienveillants dans les domaines du Design, du Marketing, du Business, de l’UX, de l’UI et de l’IT. Tout cela en une Force incarnant l’intelligence émotionnelle et l’intelligence collective au service du projet de l’entreprise.
Le design thinking à exercer d’urgence !
Et si vous souhaitez vous former, IDEO.ORG propose ce super MOOC https://www.plusacumen.org/courses/introduction-human-centered-design
Sources :
- https://www.ideo.com/eu
- http://www.businessinsider.fr/us/the-worlds-25-best-design-schools-2012-11/
- https://www.lescahiersdelinnovation.com/2015/04/vers-la-mort-du-design-thinking/
Références :
- https://www.interaction-design.org
- https://medium.com
Pas encore de commentaires